Jésus s’est manifesté à Josefa quelques fois déjà... Elle le connait..Au mois d’octobre de la même année, il lui propose une "alliance d’amour".
Qu’est-ce que cela signifie ?
La réflexion qui suit nous aide à bien comprendre.

Depuis la création, Dieu appelle les hommes à une vie de relation, de communion et d’amour avec lui. C’est pour faire alliance avec nous et nous donner son amour qu’il nous a créés.
C’est sous la forme d’une alliance que Dieu a parlé de ses relations avec le peuple d’Israël.
C’est à une alliance que le Christ a rapproché son sacrifice - le sang de la nouvelle alliance - pour sceller à jamais, dans sa propre vie, une alliance avec nous .
Voilà la révélation fondamentale de toute la Bible !

Une alliance, qu’est-ce à dire ?

Dans la culture de la Bible, l’alliance est une relation mutuelle d’appartenance, un pacte bilatéral avec des droits et des devoirs réciproques. L’origine de l’alliance se trouve dans les pactes politiques et militaires.
Il est étonnant qu’Israël ait vu ses relations avec Dieu sur ce modèle parce que l’alliance suppose des relations d’égal à égal. Or, Israël a un sens aigu de la grandeur et de la souveraineté de Dieu.
Pour Israël, l’alliance est une pure grâce : elle est le fruit de l’amour et de la bonté de Dieu.
Dieu est à l’origine de l’alliance, c’est lui qui la veut. " J’établirai mon alliance avec toi " dit-il à Noé. Elle est gratuite, car Israël n’a rien fait pour la mériter, au contraire, il est le plus petit de tous les peuples et, en plus, nous savons qu’il a la nuque raide.
C’est Dieu qui décide des conditions de l’engagement, de son contenu : c’est lui qui donne la loi à Moïse.
Ce qu’il y a de plus remarquable dans cette alliance, c’est que Dieu en fait les frais : ce que Dieu apporte, c’est lui-même. Dieu commence par révéler son nom : " Je suis ". Or, on sait qu’en hébreux, le nom donne accès à la réalité intime. Dieu veut révéler et donner son être le plus profond. Cette révélation est le premier pas d’un don total qui s’exprime dans ces mots : " Je suis votre Dieu et vous êtes mon peuple ". Dieu dit son appartenance au peuple hébreu : il se donne, il se lie, en toute liberté.

Chapelle de l’hôtel Biron à Paris, construite par Mère Barat

En quoi ce pacte est-il bilatéral ?

Bilatéral ne signifie pas égalité des partenaires. Mais Dieu a voulu que ce don de lui-même soit dépendant de l’acceptation du peuple. Dieu se fait dépendant. Il n’est pas dépendant par "nature ", "en soi ", mais il le devient par amour et pour toujours.
Un don ne s’impose pas - une relation ne s’impose pas - mais demande d’être reçu, accepté. C’est seulement au moment où le don est accepté que l’engagement devient mutuel.
Si elle est gratuite dans le don - nous avons tout à gagner !- l’alliance est bilatérale dans l’engagement. Dieu s’engage à protéger, à assister son peuple, à lui donner une terre où coule le lait et le miel tandis que le peuple s’engage à être fidèle à Yawhé et à respecter le mode de vie que Dieu lui propose (la loi). Pour cela, il faudra l’écouter, comprendre sa loi et la mettre en pratique.
Or, le peuple ne va pas respecter cet engagement … c’est le drame de toute l’histoire de l’Ancien Testament. En conséquence, l’alliance est rompue mais Dieu, qui est plus fidèle que le peuple, vient réparer les dégâts et reprend une nouvelle alliance, encore plus forte que la première - ce sera ainsi jusqu’à Jésus. Comme si le péché, qui rend l’homme malheureux, stimulait la fidélité de son amour. Et ainsi le peuple apprend à aimer comme il est aimé.

Dans le Nouveau Testament

Jésus est le lieu de l’alliance dans ce qu’elle a de plus fort : Jésus, parce qu’il est Dieu-Homme, est l’alliance : il est à la fois l’époux et l’épouse.
Il est le " Oui " de Dieu aux hommes - Dieu se donne entièrement - mais il est aussi le " Oui " des hommes à Dieu.
La consommation de la noce, du "Oui" au Père se fera dans la passion et la mort de Jésus. La croix est une folie de dépendance et d’amour de Dieu et des hommes : "Dieu a tant aimé le monde qu’il nous a donné son Fils …" pour se mettre du côté des hommes et, en notre nom à tous, dire "Oui" au Père.
C’est incompréhensible pour notre intelligence … mais c’est comme cela. Sans trop bien comprendre, nous sommes fascinés, attirés, aimantés par un tel amour qui se donne entièrement. " Seigneur, à qui irions-nous, tu as les paroles de la vie éternelle - Jamais homme n’a parlé comme cet homme – Vraiment cet homme était le fils de Dieu "

L’alliance est passée de l’image d’un pacte, qui comporte des engagements et des prestations, à l’image d’une union conjugale, époux-épouse, faite d’un amour libre qui prend toute la personne dans ses puissances affectives et qui se vit dans l’intimité et la tendresse. C’est une union d’action et d’affection réciproque.

Aujourd’hui

Dieu continue à nous appeler à faire alliance avec lui, personnellement et en Eglise…. Par la présence du Ressuscité qui nous habite, par la présence de l’Esprit, par l’Eucharistie, Dieu continue à nous appeler, à nous unir à lui.
C’est dans ce mouvement qu’il faut voir l’histoire exceptionnelle de Josefa.
Ce que Josefa a vécu, nous sommes aussi appelés, par Jésus, à le vivre, à notre mesure.
L’alliance d’amour est inclue dans le Baptême, elle est pour tous les chrétiens. Elle prend une forme unique pour chacun.

Le fruit de cette alliance est le bonheur :

Bonheur de Josefa - et à sa suite, le bonheur personnel de tous ceux qui répondent à son alliance - on se souvient du bonheur de Josefa quand elle parle de ces moments de rencontre avec Jésus comme des moments de ciel. Oui …Dieu nous a faits pour lui !
A sa mort, Josefa dit :
" Si l’on savait … On ne chercherait jamais rien d’autre sur terre que de faire la volonté de Dieu. Personne ne peut se faire une idée de ce bonheur… c’est l’unique chose qui donne la paix. " - "Appel à l’Amour" : p.611
Le bonheur de ceux qui recevront le Message :
"Voici ce que je viens dire aux hommes : en vain chercheront-ils le bonheur ! En dehors de moi, ils ne le trouveront pas … A tous, je viens dire : si vous voulez le bonheur, je le suis… " - "Appel à l’Amour" : p. 496

Quelques étapes de l’alliance entre Jésus et Josefa :

Parce qu’il est amour, Jésus veut s’unir à nous et nous unir à lui : il demande une intimité, un échange, une communion :
Qu’est-ce qu’il a à donner ? Sa richesse.
Qu’est-ce que nous avons à donner ? Notre pauvreté.

• " Comment Jésus fit à mon âme son premier appel ".

Au moment de sa première communion, à l’âge de 11 ans, Josefa fait une courte retraite et raconte dans ses notes, écrites plus tard par obéissance :
" Le premier jour, j’ai fait une méditation sur ces paroles : " Jésus veut venir à moi pour que je sois toute à lui. " J’en fus très contente…
Le second jour, la méditation avait pour sujet : " Jésus est l’époux des vierges, il se réjouit dans les âmes pures et innocentes ". Il me sembla qu’il se faisait en moi une grande clarté et je pensais qu’étant son épouse, je serais toute sienne parce que je voyais que maman était tout à papa parce qu’elle était son épouse. Ainsi, je me disais qu’en étant vierge, je serais à Jésus. Je ne comprenais pas ce que c’est que d’être vierge mais je promis en toute vérité d’être à Jésus.… Que j’étais contente ! Pendant que je me sentais ainsi tout heureuse, j’entendis une voix que je n’oublierai jamais et qui se fixa dans l’intime de mon âme :
"Oui, ma fille, Je veux que tu sois toute mienne".

• 16 juillet 20 : A sa prise d’habit :

Josefa écrit ceci :
" Dieu m’appelle à une conformité totale avec son cœur… Dieu m’appelle à une vie intime avec lui… Il veut que ma vie se passe dans son cœur et je dois savoir que les épines et la croix y sont enfoncés…"
Elle a conscience de sa vocation sans savoir comment cela va se réaliser.
Sa réponse est spontanée :
" Mon Dieu, je suis vôtre pour toujours ".
Sa réponse est proche de celle des disciples quand Jésus leur dit :
" Viens et suis-moi " - "Se levant, ils le suivirent" rapporte Saint Jean dans son Evangile.
Le "oui " à Dieu, en Jésus, est donné dans son âme. Jésus peut continuer à se donner à elle.

• Octobre 20 : La petite fille entourée d’épines :

8 octobre 1920 : Jésus lui apparaît :
" Désormais, Josefa, ne m’appelle plus que Père et Epoux. Si tu m’es fidèle, nous ferons cette divine alliance : tu es mon épouse, je suis ton époux ".

9 octobre 1920 : Le lendemain, Jésus lui montre une petite fille entourée d’épines. Elle comprend qu’il s’agit d’elle et, prise d’inquiétude, elle recule.

13 octobre 1920 : Jésus lui propose de choisir entre deux alternatives :

• Soit, elle pourra vivre dans la communauté la vie simple et cachée qu’elle désire,
• Soit, elle accepte d’entrer dans son projet sur elle.
  Et Jésus ajoute : "Tu me plairas des deux façons. Maintenant tu peux choisir. Mais tu me donneras plus de gloire au chemin que je te prépare… Je me servirai de ta petitesse pour sauver les âmes ".

Ce passage fait penser à l’épisode du jeune homme riche : il suit les commandements, sa vie est belle, elle porte des fruits, mais il désire quelque chose de plus. Jésus, dit le texte, le regarda et l’aima. Il lui dit :
" Si tu veux …viens et suis-moi !.. .. avec les risques que cela comporte, en abandonnant tout ce que tu souhaites, tout ce que tu es … suis-moi. J’irai bien plus loin avec toi … Tu me donneras plus de gloire..."
C’est le choix que Jésus adresse à certains : être son disciple, le suivre, observer le mode de vie qu’il propose - et c’est très bien - ou être apôtre : associés à sa personne, à sa mission, vivre ce qu’il a vécu dans une communion de destin avec lui.

• Josefa dit oui à cette invitation.

14 octobre 1920 : Jésus lui apparaît pour la première fois avec sa croix et lui demande de la porter avec lui. Elle fait l’expérience que, non seulement elle est forte, mais qu’elle est au comble du bonheur. Jésus l’associe à sa souffrance. Sa joie n’est pas de souffrir mais d’être unie à Jésus… même dans la souffrance. Cette joie, nous dit-elle, est bien plus grande que la souffrance.

15 octobre 1920 : elle redit à Jésus que son unique désir est de faire la volonté de Dieu. Marie l’encourage sur ce chemin. Suivent pour Josefa des journées de joie profonde.
Il y a comme un non retour en arrière dans son alliance avec Jésus.

17 octobre 1920 : Jésus s’adresse à Josefa :
" Si tu es disposée à m’être fidèle, je répandrai dans ton âme le torrent de ma miséricorde et tu connaîtras l’amour que j’ai pour toi ".

7 décembre 1920 : Il lui dit encore :
"Je désire que tu me laisses la liberté de mettre un courant entre mon cœur et le tien, de telle sorte que tu sois en moi et ne vives en rien pour toi ".

• Novembre 1920 : Porter avec lui la rédemption.

Encore un nouveau pas dans l’alliance. Jésus dit à Josefa :
" Veux-tu porter le fardeau d’autres âmes ? "
Etre unie à Jésus, c’est porter avec lui le souci de la rédemption.

Juin 1921 : Jésus lui confie trois prêtres, un pécheur, deux âmes choisies, une communauté …

Porter avec Jésus la rédemption, c’est aussi entrer avec lui dans le combat contre le mal :

Janvier 1922 : En réponse aux attaques du démon, le Père Boyer, son directeur spirituel, invite Josefa à sceller plus profondément encore son alliance avec le Seigneur en prononçant immédiatement le vœu de chasteté.

Février 1922 : vœu de rester dans la Société du Sacré-Coeur.

15 mars 1922 : Jésus l’encourage : "Si tu t’occupes de ma gloire, moi je m’occuperai de toi. J’affermirai en toi mon règne de paix et rien ne pourra te troubler … et nul ne pourra ravir ta joie. "

Juillet 1922 : retraite et premiers vœux. L’alliance est scellée.

15 juillet 1922 : "Appel à l’Amour" p.244 . La veille de ses vœux , Josefa écrit :
"Je vais épouser un roi qui apporte la richesse en surabondance. Mettre de côté mon pauvre jugement pour penser comme lui, vouloir comme lui…Quant à moi, je me donne tout entière à vous, corps et âme, sans autre désir que de glorifier votre cœur que j’aime tant ! Que le monde entier vous connaisse… et que les âmes qui vous sont consacrées vous aiment toujours plus ! … Rien ne nous séparera, ni la vie ni la mort. Ici-bas et pour l’éternité, je suis désormais : Maria-Josefa Menendez de Jésus. "

16 juillet 1922 : En réponse à ses vœux, Jésus lui dit :
"De toute éternité, je suis à toi ; désormais, tu es à moi pour toujours ! Tu travailleras pour moi. Je travaillerai pour toi. Tes intérêts sont les miens, mes intérêts sont les tiens…Et maintenant, je vais commencer mon Oeuvre ".

Août 1922 : Premières dictées du Message.
Entre les époux, il y a communauté de biens : ce qui est à lui est à elle. Comme entre le père et le fils de la parabole : "Tout ce qui est à moi est à toi."
Epoux-épouse, Père-enfant sont les images pour dire la force de cette relation.
Souvent Josefa dira de Jésus :
"Il est tellement Père …"
Admirable échange où tout est donné de part et d’autre. Deux cœurs de pauvres qui s’échangent dans la confiance. Jésus peut donc lui confier ce que son cœur a de plus précieux.

Carême 23 :
"Si tu es mon épouse, Josefa, tu dois être semblable à moi » :
apôtre et victime avec lui."

27 février 1923 :
" Ne t’inquiète pas. Si tu ne te sépares pas de moi, tu seras forte de ma force même et ma puissance sera la tienne. "
Ces paroles de Jésus rappelle l’expérience de Paul : "Ce n’est plus moi qui vis, c’est le Christ qui vit en moi. " En effet, Jésus lui avait dit :
" Ma grâce te suffit"
" Ma force se déploie dans ta faiblesse "

26 mai 1923 : (à Marmoutiers) veille de la Trinité : Josefa fait l’expérience d’un échange mystérieux où Jésus lui arrache son cœur pour lui donner la flamme du feu de son cœur à lui.

• La petite colombe

Josefa devient infiniment précieuse aux yeux du Père parce qu’elle incarne de plus en plus fidèlement le visage de Jésus totalement pauvre. Elle est Jésus, pleinement unie à lui. Le Père peut l’aimer totalement comme il aime Jésus.

Décembre 1923 : Jésus l’a rendue semblable à lui. Il vient la chercher pour la conduire au Père. Il l’a conduite avec douceur et respect …

Jésus est l’amour et ce qu’Il veut, c’est se donner dans l’alliance.
A nous aussi, il propose d’entrer dans cette alliance, celle qui fera de nous des Vivants pour l’éternité !

Soeur Chantal